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4e mystère joyeux

La Présentation de Jésus au temple

 Tirée des Méditations sur les mystères de notre sainte foi
du vénérable père Du Pont, s. j.

 

DE LA PURIFICATION DE LA VIERGE
ET DE LA PRÉSENTATION DE L'ENFANT AU TEMPLE

  

I. — Vertus pratiquées par la Vierge dans la Purification

La loi ancienne ordonnait aux femmes qui mettaient au monde un fils de rester enfermées dans leur maison pendant quarante jours, comme étant impures ; puis, d'aller au temple pour y être purifiées. Elles devaient offrir un agneau et une tourterelle, ou, si elles étaient pauvres, deux tourterelles ou deux pigeonneaux, conjurant le prêtre de prier pour elles. Marie observa exactement cette loi, et pratiqua plusieurs vertus admirables, particulièrement six, qui furent comme les six feuilles de ce lis d'une éclatante blancheur, dont parle l'Époux céleste dans les Cantiques, lorsqu'il dit : Comme le lis est entre les épines, telle est ma bien-aimée entre les filles de Jérusalem.

La première de ces vertus est l'attrait pour le recueillement. Marie goûtait une joie si parfaite dans sa solitude, que, la loi ne lui eût-elle pas défendu d'en sortir, elle y serait demeurée très volontiers, uniquement occupée à contempler les perfections de son divin Fils, et à remplir à son égard tous les devoirs d'une mère. Ceci suffisant pleinement à son bonheur.

La seconde est un amour très délicat pour la pureté de cœur. Elle est pure entre toutes les créatures, et néanmoins elle veut observer la loi, afin de se purifier davantage et de mériter que le Saint-Esprit lui adresse ces paroles des Cantiques : Vous êtes belle, ma bien-aimée ; il n'y a point de tache en vous.

La troisième est une obéissance héroïque. Elle sait qu'elle a conçu par la vertu du Saint-Esprit, et que par conséquent, la loi de la purification n'est point faite pour elle. Elle consent toutefois à s'y assujettir, comme son Fils s'est soumis à la loi de la circoncision. Ennemie des dispenses et des privilèges, elle ne veut se distinguer en rien des autres mères ; elle met sa vertu à satisfaire aux obligations communes, sans éluder ou affaiblir la loi par des interprétations commodes, elle qui a les raisons les plus légitimes pour s'en exempter. Ainsi, après avoir passé quarante jours pleins dans la retraite, elle sort de sa maison et s'achemine en toute diligence vers Jérusalem, marchant avec une joie modeste, les yeux constamment fixés sur son Fils qu'elle porte entre ses bras, et dont l'exemple lui est une admirable leçon d'obéissance.

La quatrième est une rare humilité. Cette vertu porte Marie à vouloir être traitée, non comme vierge, mais comme une femme ordinaire qui a besoin d'être purifiée : en quoi elle montre un égal amour et pour l'humiliation et pour la pauvreté. Que sa conduite doit me confondre quand les mouvements de mon orgueil me font désirer de passer pour saint, moi qui ne suis en réalité qu'un misérable pécheur, dont les bonnes œuvres mêmes, comme parle Isaïe, sont semblables à un linge souillé !

La cinquième est un tendre amour pour la pauvreté qui est la sœur de l'humilité. Avec l'or que lui ont donné les Mages, elle peut acheter un agneau pour l'offrir au temple, selon l'usage des femmes riches et nobles ; mais elle aime mieux passer pour pauvre, et ne présenter, comme les pauvres, que deux tourterelles ou deux pigeonneaux.

La sixième est une douce et fervente dévotion qui paraît dans le respect avec lequel elle présente son offrande au prêtre, et dans la manière humble dont elle le supplie de prier pour elle, bien que sa haute sainteté la rende digne de prier pour les autres.

Enfin, comme au milieu des six feuilles dont le lis est composé s'élèvent six tiges terminées chacune par un bouton d'or, on peut dire aussi que, outre les six principales vertus exercées par la Vierge dans ce mystère, son intention droite et pure de glorifier Dieu lui fait produire un grand nombre de pieuses affections, dans lesquelles les lumières d'une sagesse céleste sont mêlées avec les saintes ardeurs de la charité.

Je me réjouis, glorieuse Vierge, de vous voir ornée de tant de vertus et si pleine de ferveur à les pratiquer. Je reconnais maintenant que vous êtes véritablement un lis entre les épines ; car nos péchés, comme des épines, nous percent, nous déchirent et nous défigurent, tandis que vous êtes au milieu de nous comme un lis d'une merveilleuse blancheur, composé d'autant de feuilles que nous admirons en vous de vertus. On voit bien que vos yeux sont attachés sans cesse sur le Roi de gloire couché dans la crèche, ou reposant sur vos genoux, puisque votre âme, à son exemple, répand ainsi que le nard une odeur très douce, et forme, de votre pureté, de votre humilité et de votre obéissance, un parfum agréable qui brûle, sans se consumer, dans les flammes de la charité. Faites, ô Vierge sainte, que mes yeux soient toujours fixés sur vous et sur votre Fils, afin que, m'appliquant à imiter ses vertus et les vôtres, je répande partout la bonne odeur d'une édifiante et sainte vie. Ainsi soit-il.
 

II. — Jésus présenté dans le temple

La loi ordonnait encore que tous les premiers-nés des Hébreux fussent offerts et consacrés au Seigneur, en mémoire du bienfait signalé qu'il leur avait accordé en les tirant de l'Égypte, après avoir fait mourir en une seule nuit tous les premiers-nés des Égyptiens. Ce fut pour accomplir cette loi que Marie porta son Fils au temple et qu'elle l'offrit au Père éternel.

1) Considérerons avec quel esprit de dévotion la Vierge fit cette offrande, en son nom et au nom de tout le genre humain. Père saint, dit-elle, voici votre Fils unique, en tant qu'il est Dieu, et mon Fils premier-né, en tant qu'il est homme ; voici celui qui représente tous les premiers-nés offerts à votre divine Majesté jusqu'à ce jour, et dont vous attendiez si vivement la venue dans votre saint temple. Nous vous l'offrons de tout mon cœur, en action de grâces de ce que vous me l'avez donné : pouvons-nous vous présenter un don meilleur ? Il est à vous ; recevez-le dans vos bras paternels : il y sera plus à sa place qu'entre les miens. Recevez-le, ô mon Dieu, en odeur de suavité, pour la rédemption de tous les hommes ; comme une oblation plus précieuse que celle d'Abel, plus agréable que celle de Noé, plus sainte que celle d'Abraham, préférable à toutes celles que Moïse a ordonné de vous faire selon la loi. Nous vous conjurons, par ses mérites, d'accorder à tous les hommes le pardon de leurs offenses, et de ne point leur refuser votre amitié. — Oh ! qui pourrait dire avec quelle complaisance cette offrande fut acceptée par le Père éternel, et à cause de son excellence, et à cause de la sainteté de la personne qui la lui présentait.

2) Considérerons avec quel dévouement l'Enfant béni s'offrit au Père éternel, dans le temple. Voici, dit-il, ô mon Père, voici votre Fils unique qui s'est fait homme pour vous obéir, et qui vient à votre temple pour vous honorer. C'est dans ce saint lieu que je me présente devant votre divine Majesté, prêt à la servir et à faire tout ce qu'il lui plaira de me commander. Puisque ni le massacre des premiers-nés de toute l'Égypte, ni l'oblation des aînés d'Israël n'ont pu sauver les hommes coupables, je me dévoue pour eux à la mort, afin que mon sang apaise votre colère et qu'il soit le prix de leur rédemption. C'est ainsi que le Verbe incarné vérifie cette parole du grand apôtre : Il nous a aimés, et il s'est livré lui-même pour nous, en s'offrant à Dieu pour l’expiation de nos péchés, comme une oblation et une victime d'agréable odeur. Il est à croire que cette auguste cérémonie se fit au commencement du jour, temps où l'on avait coutume d'immoler l'agneau pour le sacrifice du matin, afin qu'il y eût un rapport plus frappant entre la figure et la réalité. Oh ! que le Père éternel agréa volontiers cette offrande qu'il attendait depuis tant de siècles : car toutes celles qu'on lui avait faites jusqu'alors des premiers-nés de son peuple n'avaient été de quelque valeur devant lui, que parce qu'elles étaient des images et des ombres de celle-ci !

3) Il est certain que Notre-Seigneur s'offrit à son Père pour la Rédemption de tous les hommes en général ; mais il est également vrai qu'il nous avait alors présent dans la mémoire et dans le cœur et qu'il s'offrit aussi pour nous en particulier. Dans cette pensée, nous nous renfermerons avec Jésus et avec Marie dans notre âme, qui est le temple de Dieu ; et là, nous présenterons au Père des miséricordes son Fils bien-aimé en reconnaissance de la faveur qu'il nous a faite de nous le donner pour Rédempteur et pour Maître. Nous le supplierons d'agréer cette offrande, de nous accorder par ses mérites le pardon de tous nos péchés, et de nous rendre participant de ses grâces.

Ô Père éternel, je vous offre de toute l'affection de mon cœur votre Fils unique. Je ne mérite pas que vous receviez cette offrande de ma main ; j'espère toutefois que vous aurez plus d'égard à sa valeur qu'à mon indignité, et que vous l'accepterez avec joie. Recevez-la donc, Seigneur, en satisfaction de mes offenses, afin que purifié de toute tache, je puisse paraître devant vous dans le temple de votre gloire. Ainsi soit-il.

III. — Jésus racheté

La loi ordonnait, en troisième lieu, que les premiers-nés fussent rachetés cinq sicles. Marie les paya au prêtre, et le prêtre lui rendit son Fils. Considérons sur ce passage quel est celui qui vend l'Enfant, quelle est celle qui le rachète, à quel prix et en faveur de qui elle fait ce rachat, et enfin quels biens doivent en revenir aux hommes.

1) Celui qui vend l'Enfant divin, c'est le Père éternel. Marie présente aujourd'hui son Fils dans le temple selon la loi. Le Père, qui nous l'a donné, le reçoit ; mais ce n'est pas pour nous le reprendre et le garder, c'est pour nous le donner de nouveau ; c'est, disons-le, pour nous le vendre à notre grand avantage. Admirerons ici la libéralité du Père éternel. Loin de se repentir de nous avoir donné une fois son Fils, il confirme ce qu'il a fait ; il nous crée même un nouveau droit sur ce Fils bien-aimé. (Jusqu'ici nous possédions Jésus à titre de volontaire donation, désormais il nous appartiendra à titre de légitime acquisition.)

2) La personne qui rachète le saint Enfant, c'est Marie. Elle le retire des mains du prêtre et l'emporte avec elle pour le nourrir de son lait en qualité de mère. Mais c'est pour nous, non pour elle, qu'elle le rachète ; si elle le nourrit, c'est afin qu'il grandisse, qu'il nous instruise, et qu'il meure un jour pour notre salut.

3) Le prix du rachat est de cinq sicles.

Ô Père éternel, que vous cédez à vil prix ce que vous avez de plus cher ! Vous n'estimez pas plus votre Fils unique qu'un enfant ordinaire ; mais en vérité, s'il suffit de cinq sicles pour racheter les autres enfants, ne faudrait-il pas des millions de sicles pour racheter Jésus, qui vaut lui seul plus que tout le genre humain ? Je le vois bien, ô mon Dieu, il ne s'agit ici ni de vente ni de rachat, bien que l'on emploie ces noms ; je n'y vois qu'une donation toute gratuite, pour laquelle je vous dois d'éternelles actions de grâces. Que toutes les créatures vous en remercient ; qu'elles bénissent à jamais votre infinie miséricorde !

Dans un sens moral et spirituel, les cinq sicles marquent le prix auquel l'âme fidèle achète l'or très pur de la sagesse divine, qui est Jésus, de la manière qu'il est possible de l'acheter. Or ce prix n'est autre chose que la mortification des cinq sens corporels, et la pratique des cinq vertus qui servent de disposition à la grâce et à la parfaite sainteté, c’est-à-dire : la foi vive, la crainte de Dieu, le regret du péché, la confiance en la divine miséricorde, le ferme propos d'obéir au Seigneur et d'accomplir en toutes choses sa sainte volonté. Par conséquent, ô mon âme, si tu désires posséder Jésus, souviens-toi qu'on ne l'achète point au prix de l'or et de l'argent, mais par l'exercice de ces vertus. Mets-les avec soin en pratique, et tu obligeras le Père éternel à te donner son Fils.

4) Considérons enfin pourquoi le Sauveur veut être vendu et racheté. Il le veut pour devenir le serviteur et l'esclave des hommes et se livrer pour eux à la mort.

Ô doux Jésus, avec quelle joie de votre cœur vous voyez que votre Père céleste vous vend et que votre Mère vous rachète ! Vous annulez par la vente de votre personne, celle que j'ai faite de mon âme en péchant, et vous me rachetez par votre rachat, afin que je sois tout à vous. Mais votre amour n'en demeurera pas là. Vous souffrirez un jour qu'un de vos disciples vous vende encore une fois, et que vos ennemis vous achètent pour vous ôter la vie ; et vous achèverez par votre mort l'œuvre de notre Rédemption. Bénie soit votre charité sans mesure qui ne se lasse pas de nous combler de biens. Ô mon âme, réjouis-toi de ce que le Père éternel t'a vendu son Fils bien-aimé au prix de cinq sicles ; réjouis-toi de ce que Marie, en rachetant l'Agneau de Dieu, t'a acquis un Rédempteur. Ô mon Jésus, vous êtes à moi à titre de vente et d'achat ; mais en retour je me donne tout à vous, et j'ose dire plein de confiance, avec l'Épouse des Cantiques : Mon bien-aimé est à moi, et je suis à lui. Faites, Seigneur, que je ne vous abandonne jamais, et que jamais je ne mérite d'être abandonné de vous. Ainsi soit-il.

 

 

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