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Lettre de liaison n° 108 (4 juin 2020)
Chers amis,
Le secret confié par Notre-Dame le 13 juillet 1917 à Fatima comprend trois points. Les deux premiers ont déjà été largement commentés dans les précédentes lettres de liaison. Et la lettre de liaison n° 103 a rappelé comment ils avaient été révélés. Mais il n’est pas possible d’en rester là : pour bien comprendre le message de Fatima, il est nécessaire d’étudier également le troisième point. Car que ce soit les paroles prononcées par Notre-Dame ou les visions montrées aux petits voyants, tous ces éléments sont importants. Il n’est pas possible d’en mettre ne serait-ce qu’un seul de côté sous prétexte qu’il serait difficile à comprendre ou au cœur d’une polémique. Et quand bien même ce serait le cas, cet aspect aussi est sûrement permis par la Sainte Vierge pour nous signifier quelque chose.
Effectivement, le troisième point du secret fait toujours couler beaucoup d’encre. Pour tenter d’y voir un peu plus clair, il faut auparavant bien connaître son histoire.
La mise par écrit du secret
L’histoire du secret de Fatima commence le 13 juillet 1917, date à laquelle la Sainte Vierge le confia aux trois petits voyants. Si Lucie ne cacha pas qu’ils avaient reçu un secret, jamais aucun des trois enfants n’en dévoila le moindre élément, même lorsque Artur de Olivera Santos, l’administrateur du canton de Vila Nova de Ourem, les menaça de les faire frire dans un chaudron d’huile bouillante. Après la mort de François le 4 avril 1919, puis de Jacinthe le 20 février 1920, Lucie resta la seule à le connaître et à pouvoir le révéler.
Avec l’autorisation du Ciel, elle commença à en dévoiler certains éléments à partir de 1925, notamment la communion réparatrice des premiers samedis du mois et la consécration de la Russie au Cœur Immaculé de Marie. Mais ni la commission d’enquête, ni ses confesseurs de l’époque ne souhaitèrent en savoir plus que ce que Lucie leur confia spontanément. (voir lettre de liaison n° 103)
Entre 1935 et 1941, à la demande de Mgr da Silva, sœur Lucie rédigea quatre mémoires. Dans les deux premiers, elle reste très évasive sur la question du secret : elle en présente certains éléments : l’enfer, le Saint-Père, … mais sans dire qu’ils viennent du secret. Ce n’est que dans le troisième, rédigé en août 1941, que, pour la première fois, elle révèle une grande partie du secret : sur les trois points qu’il contient, elle en révèle deux : la vision de l’enfer et la dévotion au Cœur Immaculé de Marie. Un mois plus tard, très frappé par le contenu de ce mémoire, Mgr da Silva lui demanda un récit complet des apparitions. Lucie lui envoya donc un quatrième mémoire dans lequel se trouve également le secret du 13 juillet mais toujours amputé du troisième point. Par rapport à la rédaction précédente, Lucie n’ajouta que quelques mots : « Au Portugal se conservera toujours le dogme de la foi, etc. Ceci ne le dites à personne. À François, oui vous pouvez le dire. »
Dans la présentation du dossier publié le 26 juin 2000 par le Vatican pour diffuser le secret, présentation signée de Mgr Bertone, il est affirmé que la première phrase ajoutée (« Au Portugal se conservera toujours le dogme de la foi, etc. ») est une simple annotation. Cette affirmation est irrecevable, car dans le passage concerné, rien n’indique qu’il s’agit d’une annotation. En général, une note est placée après le texte lui-même, ou éventuellement entre parenthèses. Or cette phrase est dans le corps du paragraphe. Voici une reproduction du passage concerné :
De même, il n'y a pas de retour à la ligne ni avant la partie ajoutée, ni après le "etc." alors que, dans ses écrits, sœur Lucie utilise fréquemment le retour à la ligne : la soi-disant "annotation" se situerait donc entre deux phrases de la Sainte Vierge.
Enfin, il n’y a d’annotation nulle part ailleurs dans les quatre mémoires : si la phrase sur le Portugal en était une, ce serait la seule exception dans près de deux cent pages manuscrites. La façon dont sœur Lucie a placé cette phrase dans le quatrième mémoire exclut donc complètement qu’il puisse s’agir d’une simple annotation.
La rédaction du troisième point
En juin 1943, sœur Lucie contracta une pleurésie. Mgr da Silva s’inquiéta beaucoup de ce que cette maladie pourrait l’emporter avant qu’elle ait mis l’intégralité du secret par écrit. C’est pourquoi, le 15 septembre, il se rendit à Tuy pour lui demander de le mettre par écrit, mais sans lui donner un ordre formel, en précisant que ce n’était pas pour le diffuser mais simplement pour en avoir un exemplaire, au cas où. Cette demande plongea sœur Lucie dans un embarras terrible. Dans La vérité sur le secret de Fatima, (édition Téqui, 1979, p. 55) le père Alonso rapporte qu’elle « se plaignait en disant qu’il [le reste du secret] n’était pas nécessaire [de le dire] parce qu’elle l’avait déjà dit avec clarté ailleurs ». Et quelques pages plus loin (p. 63), il parle « d’une certaine phrase de Lucie se plaignant de ce qu’il n’était pas nécessaire de l’écrire puisque d’une certaine façon, elle l’avait dit ».
Elle avait pourtant révélé les deux premières parties sans difficulté particulière dès que ses supérieurs le lui avaient demandé. Mais, le troisième point lui posait visiblement une difficulté supplémentaire. Car elle ne put se résoudre à l’écrire, ni dans le troisième, ni dans le quatrième mémoire. Le père Alonso rapporte (op. cit., p. 25) qu’elle confia un jour :
Il me semble que l’écrire, c’est déjà en quelque façon le révéler et je n’ai pas encore l’autorisation de Notre-Seigneur pour cela. De toute façon, comme je suis habituée à voir dans les désirs des supérieurs la volonté de Dieu, je regarde l’obéissance et je ne sais que faire. Je préfère un ordre formel sur lequel je puisse m’appuyer devant Dieu et qui me permette de dire avec sécurité : « Mandaram-mo, Senhor [On me l’a ordonné, Seigneur] ». Mais ces mots : « Se a Irma quizesse [Si la sœur le veut] » me troublent et me laissent perplexe.
Aussi déclara-t-elle à l’évêque de Leiria qu’elle n’obéirait qu’à un ordre formel de sa part.
Vers la mi-octobre, la santé de sœur Lucie ne s’étant pas améliorée, Mgr da Silva lui écrivit pour lui donner l’ordre formel de mettre par écrit le troisième point du secret. Habituée à ce que le Ciel confirme les ordres de ses supérieurs, sœur Lucie fut tourmentée cette fois-ci de ne recevoir aucune confirmation. Elle tenta d’obéir à son évêque mais, pendant près de trois mois, elle en fut incapable. En décembre, toujours dans l’incapacité de le transcrire, elle fit part de ses angoisses à son confesseur Mgr Garcia y Garcia :
On m’a recommandé d’écrire la partie du secret révélé par la Très Sainte Vierge en 1917 et que je garde cachée par ordre de Notre-Seigneur. On me demande de l’écrire soit dans les cahiers où l’on m’ordonne de noter mon journal spirituel, soit sur une feuille de papier, et de le mettre sous enveloppe cachetée à la cire. (op. cit., p. 27)
Le père Alonso précise (p. 29) que « plusieurs fois, elle avait voulu obéir, qu’elle s’était assise pour écrire, sans pouvoir le faire » et que « ce phénomène n’était pas dû à des causes naturelles ».
Enfin le 3 janvier 1944, dans la chapelle de Tuy, là où elle avait reçu tant de révélations, la Sainte Vierge lui apparût pour lui confirmer que c’était bien la volonté de Dieu que désormais elle révèle le troisième point du secret. Elle n’eut alors aucune peine à le mettre par écrit. Voici comment le chanoine Martins dos Reis rapporte l’événement :
Avant cette apparition de la Mère de Dieu, à l’infirmerie de Tuy [d’après les cahiers de sœur Lucie, ce fut à la chapelle], par trois fois la voyante avait essayé d’écrire le secret pour obéir à l’ordre de don José Alves Correia da Silva, mais elle n’en fut jamais capable. Ce ne fut qu’après cette vision qu’elle put le faire sans la moindre difficulté, se libérant en même temps de la grande perplexité dans laquelle elle se trouvait en face de l’attitude divergente des deux prélats [Mgr da Silva et Mgr Garcia y Garcia].
Elle mit ensuite le secret dans une enveloppe qu’elle cacheta avec de la cire. Dans ses cahiers, elle raconte qu’ayant demandé un peu de cire à sa supérieure et ayant essuyé un refus, elle en trouva un petit bout dans une corbeille à papier et, après avoir demandé à sa supérieure l’autorisation de s’en servir, elle put ainsi cacheter l’enveloppe.
Le secret est remis à Monseigneur da Silva
Comme la règle ne l’autorisait à écrire que le dimanche, elle dut attendre le 9 janvier pour informer Mgr da Silva qu’elle avait enfin obéi à son ordre : « J’ai écrit ce que vous m’avez demandé ; Dieu a voulu m’éprouver un peu, mais finalement, c’était bien sa volonté : il [le texte] est cacheté dans une enveloppe et celle-ci est dans les cahiers. »
Mais elle ne voulut pas envoyer le texte lui-même par la poste : elle demanda à Mgr da Silva d’envoyer quelqu'un chercher l’enveloppe : « Si votre excellence veut que je vous l’envoie, je le remets au premier porteur de confiance que vous m’enverrez ici, ou bien si vous voulez le faire chercher à Valença, j’irai le porter là-bas. J’ai peur de l’envoyer par la poste avec la crainte que cela se perde. »
Ce ne fut qu’au mois de juin suivant que Mgr da Silva put trouver l’occasion propice. Le 17 juin, Mgr Ferreira da Silva se rendit à Valença do Minho, située près de Tuy où se trouvait sœur Lucie qui alla à sa rencontre et lui remit l’enveloppe cachetée avec les cahiers qui l’accompagnaient. Le soir-même, Mgr Ferreira remettait le précieux colis à Mgr da Silva avec des recommandations de sœur Lucie :
Lorsque Monseigneur l’évêque de Leiria reçoit le document cacheté, il reçoit également une communication de sœur Lucie où elle lui fait quelques suggestions : par exemple qu’il le garde lui-même et qu’après sa mort il soit remis au cardinal Patriarche de Lisbonne.
Après avoir reçu la précieuse enveloppe des mains de Mgr Ferreira, Mgr da Silva ne voulut pas l’ouvrir pour prendre connaissance du secret. Il la plaça dans une enveloppe plus grande sur laquelle il inscrivit :
Cette enveloppe, avec son contenu, sera remise après ma mort à son Éminence, le cardinal Don Manuel, patriarche de Lisbonne.
Leiria, le 8 décembre 1945.
Puis, il l’enferma dans son coffre. Le magazine américain Life diffusa quelques années plus tard une photo montrant Mgr da Silva avec devant lui l’enveloppe sur laquelle figurait la mention précitée.
Le chanoine Galamba, conseiller de Mgr da Silva et qui l’avait poussé à demander le secret, lui demanda plusieurs fois pourquoi il n’ouvrait pas l’enveloppe ; à chaque fois celui-ci lui répondit : « Ce n’est pas de mon ressort de m’en occuper. Les secrets du Ciel ne sont pas pour moi et je n’ai pas à me charger de cette responsabilité ». Pourtant la lettre lui était adressée et il aurait pu l’ouvrir. Voici l’avis du père Alonso à ce sujet :
L’autorité indiscutable en cette matière, c’est aussi celle du chanoine Galamba (…) : quand Monseigneur l’évêque se refuse à l’ouvrir [le secret], Lucie lui fait promettre qu’il serait ouvert définitivement et lu au monde à sa mort ou en 1960, selon ce qui se produirait d’abord. « Lucie dit seulement qu’on pouvait le révéler immédiatement si l’évêque l’ordonnait. Mais elle n’a pas dit qu’il devait le faire immédiatement. Les dates pour en faire la révélation furent déterminées après un dialogue entre l’évêque et Lucie. »
En 1947, à quelqu'un qui lui demandait pourquoi il ne voulait pas lire le secret, Mgr da Silva répondit : « Non, je n’ai pas voulu le lire. Fatima est entièrement l’œuvre de Dieu. Je ne veux pas m’en mêler. »
En 1955, le cardinal Ottaviani, pro-préfet du Saint-Office, fut envoyé à Coïmbra pour interroger sœur Lucie sur le secret. Une dizaine d’années plus tard, dans une conférence qu’il prononça à l’Académie pontificale mariale de Rome, il déclara :
L’enveloppe qui contenait le secret de Fatima fut reçue fermée par l’évêque de Leiria ; et bien que Lucie eût dit qu’il (l’évêque) pouvait le lire, celui-ci s’y refusa voulant respecter le secret et par déférence pour le Saint-Père.
Plusieurs fois, l’évêque de Leiria voulut confier le document au Patriarche de Lisbonne, mais celui-ci refusa toujours de le recevoir. Le document resta donc à la curie de Leiria jusqu'au moment où, sur ordre de Rome, il fut remis au Nonce Apostolique à Lisbonne, Monseigneur Cento, pour être transféré à Rome. L’enveloppe y restera jusqu'en 1957.
Ainsi, l’unique version du troisième point du secret, scellée sous double enveloppe, resta enfermée pendant treize ans (de 1944 à 1957) dans le coffre de l’évêque de Leiria.
Dans la prochaine lettre de liaison, nous verrons comment l’enveloppe parvint au Vatican. Mais dès maintenant, plusieurs questions se posent. Quel élément a pu pousser Monseigneur da Silva à ne pas ouvrir l’enveloppe alors qu’il en était le destinataire ? Avait-il été dissuadé de le faire par ce qu’il avait lu dans les cahiers l’accompagnant ? De même, pourquoi le patriarche de Lisbonne refusa-t-il de prendre l’enveloppe chez lui ? Pour agir ainsi, les deux prélats avaient sûrement une solide raison de penser que ce message serait difficile à accepter, raison qui se trouve probablement dans les cahiers spirituels de sœur Lucie qui accompagnaient l’enveloppe. Jusqu'à présent, aucun de ces cahiers n’a été divulgué. Pourquoi ?
Quoi qu’il en soit, il convient de retenir les points suivants :
- Sœur Lucie eut beaucoup de mal à mettre par écrit le troisième point du secret alors qu’elle avait déjà révélé les deux premiers. Le sujet traité est donc particulièrement grave.
- Le secret fut mis dans une enveloppe cachetée à la cire, et cette enveloppe fut remise fermée à Mgr da Silva, ainsi que des cahiers sur lesquels sœur Lucie tenait un journal spirituel.
- Mgr da Silva mit l’enveloppe de sœur Lucie dans une autre enveloppe sur laquelle il précisa qu’après sa mort, cette enveloppe devrait être remise au patriarche de Lisbonne.
- Mgr da Silva ne reçut aucun autre écrit concernant le secret.
- Mgr da Silva aurait pu lire le secret et le diffuser immédiatement s’il le jugeait bon. Comme il ne le voulut pas, sœur Lucie demanda qu’il soit lu au monde, soit à sa mort, soit au plus tard en 1960.
Divers
Suite à la diffusion, avec la lettre de liaison n° 107, de l’étude sur la consécration de la Russie, un lecteur a eu l’amabilité d’en faire une lecture particulièrement soignée et de communiquer les fautes qu’il a pu repérer. Le texte a été immédiatement corrigé, puis mis sur le site le 3 mai, en remplacement du texte initial. Ceux qui l’ont téléchargé avant le 3 mai sont donc invités à le télécharger à nouveau pour avoir la version corrigée.
Cette étude sera bientôt disponible sous forme de livre : une solution a été trouvée pour le diffuser à un coût modique. Vous serez avertis lorsqu'il sera possible de le commander.
À la suite de la consécration de 24 pays au Cœur Immaculé de Marie le 25 mars dernier (voir lettre de liaison n° 107), plusieurs d’entre vous nous ont signalé des pays ou des diocèses s’étant consacrés ces derniers temps. Il a paru bon d’en établir une liste la plus exhaustive possible. Une recherche sur internet a permis de trouver une première liste. Celle-ci a été complétée par nos propres informations. Vous la trouverez sur cette page du site. Si vous avez des compléments ou des corrections à y apporter, n’hésitez à les communiquer, en veillant bien, dans toute la mesure du possible, à donner les sources.
L’association Marie de Nazareth a récemment demandé à Cap Fatima de lui proposer une neuvaine au Cœur Immaculé de Marie pour se préparer à la fête du Cœur Immaculé de Marie qui, cette année dans le rit ordinaire, sera célébrée le 20 juin prochain. Vous pouvez vous inscrire à cette neuvaine en cliquant sur le lien suivant :
Cette neuvaine vous sera également proposée au mois d’août pour la fête du Cœur Immaculé de Marie qui, dans le rit extraordinaire, est célébrée chaque année le 22 août.
En union de prière dans le Cœur Immaculé de Marie.
Yves de Lassus