Dieu veut établir dans le monde la dévotion à mon Cœur Immaculé. Notre-Dame, le 13 juillet 1917
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Méditation sur le 1er mystère douloureux

L'agonie de Jésus au jardin des oliviers

 Tirée des Méditations sur les mystères de notre sainte foi
du vénérable père Du Pont, s. j.

 

DE LA PRIÈRE DE JÉSUS-CHRIST AU JARDIN DES OLIVES

  

I. — Avis pour les temps de la tentation

Notre-Seigneur Jésus-Christ étant triste et voyant que ses apôtres l'étaient aussi, leur recom­manda de prier, leur disant : « Veillez avec moi, et priez, pour ne pas entrer en tentation » et, prenant ce conseil pour lui-même, il s'éloigna d'eux à la distance d'un jet de pierre pour faire oraison.

1) Remarquons ici comment Notre-Seigneur, et par ses paroles et par ses exemples, nous enseigne que le remède à notre tristesse n'est pas de nous entretenir avec les hommes, qui ne peuvent nous donner de solides consolations, mais de recourir à l'oraison et de nous adresser à Dieu comme au principal consolateur qui peut ou dissiper ou modérer notre tristesse, selon qu'Il le juge convenable pour notre bien.

Apprenons de là, lorsqu'il nous survient quelque sujet de peine, à ne point attendre principalement notre consolation de la part des hommes, à ne la point chercher avec empressement dans les divertissements du monde, mais avant tout dans la miséricorde du Seigneur, à qui nous devons la demander, selon l'avertissement de saint Jacques, si nous voulons expérimenter la vérité de ces paroles du Psalmiste : « Mon âme refusait toute consolation: je me suis souvenu de Dieu, et j'ai été rempli de joie. »

2) Le Sauveur nous avertit encore que la prière est l'unique remède pour éviter d'entrer en tentation et de périr dans le danger. Par conséquent, plus le danger est imminent, plus nous devons prier avec ferveur. En effet, Notre-Seigneur ne dit pas : Priez, afin que vous ne soyez pas tentés, mais « Priez, afin que vous n'entriez point en tentation » et que vous ne succombiez point à la tentation. Car il nous est souvent utile d'être éprouvés par les tentations et les afflictions ; mais la prière nous empêche d'y succomber ; ou, si nous avons le malheur de tomber, elle nous obtient du ciel les secours nécessaires pour nous relever et ne point périr sans ressource.

Puisque la tentation est un danger de chaque jour, chaque jour aussi nous devons répéter avec dévotion cette dernière demande de l'Oraison dominicale : « Ne nous lais­sez pas succomber à la tentation, mais délivrez-nous du mal. Ainsi soit-il. »

3) Pesons le sens de cette parole : « Veillez avec moi. » Elle signifie : Veillez en ma compagnie ; veillez comme je veille ; imitez-moi. En parlant de la sorte, Notre-Seigneur veut nous faire comprendre qu'Il veille lui-même avec ceux qui veillent, qu'Il prie avec ceux qui prient, et que ceux qui veillent et qui prient, prient et veillent avec Lui ; qu'ils L'ont pour maître, pour compagnon, pour aide. Comment donc ne veillerions-nous pas, ne prierions-nous pas avec plaisir en pareille compagnie ?

Aidez-moi, très doux Jésus, à veiller toujours avec vous, employant les Jours à travailler et les nuits à prier ; et les jours et les nuits à obéir à celui qui n'a point cessé, toute sa vie, de veiller, de prier, de travailler par amour pour moi.

4) Remarquons enfin quel acte de mortification ce fut pour Notre-Seigneur Jésus-Christ, de se séparer de la compagnie de ses apôtres, afin d'aller prier seul. Dans les afflictions profondes et les grandes tristesses, on aime naturellement à se trouver en la compagnie de ses amis pour se consoler avec eux ; Jésus-Christ surmonta généreusement cette propension naturelle. C'est ce que marque l'Évangile en disant qu'il fut arraché d'auprès de ses disciples et violemment éloigné d'eux à la distance d'un jet de pierre, comme un homme qui, maîtrisant l'inclination des sens par la force de l'esprit, se séparait des personnes auxquelles il était attaché par l'affection naturelle, pour faire sa prière à l'écart.

Ô mon Dieu, donnez-moi la force de renoncer au lait des enfants et de me détacher des consolations humaines, pour m'adonner à l'oraison, y connaître votre sainte volonté et l'exécuter avec courage. Ainsi soit-il.

II. — La prière de Jésus-Christ

Arrivé au lieu de sa prière, Jésus se mit à genoux, se prosterna la face contre terre, et pria en disant : « Mon Père, s'il est possible, que ce calice s'éloigne de moi ; cependant, qu'il en soit, non comme je veux, mais comme vous voulez. » C'est-à-dire : mon Père, si l'arrêt de votre justice peut s'exécuter sans que je boive ce calice, faites, je vous en conjure, qu'il s'éloigne de moi : toutefois, n'ayez pas égard à mon inclination naturelle ; consultez, non ma volonté propre, mais la vôtre, car je veux qu'elle soit préférée à la mienne.

Ô sublime oraison ! Ô enseignement parfait de résignation ! Ô Jésus, modèle achevé d'obéissance et de prière, qu'elle est élevée la leçon que vous me donnez de ces deux vertus ! Ouvrez les oreilles de mon âme pour que je l'écoute, les yeux de mon esprit pour que je la comprenne ; revêtez-moi de force pour l'accomplir.

Cette prière de notre Sauveur est accompagnée de qualités remarquables, que nous devons étudier pour notre profit spirituel.

1) Ce fut une oraison attentive et recueillie. Car le Sauveur prit soin d'éloigner toutes les occasions de distraction ; Il se sépara même de ses apôtres, comme nous l'avons dit, malgré les oppositions de la nature, afin de s'entretenir seul à seul avec son Père.

2) Elle fut pleine d'humilité et d'un profond respect, intérieur et extérieur, qui procédait de trois principes : de la haute estime qu'Il avait pour la majesté divine ; de la con­naissance de sa bassesse comme homme, et par conséquent comme créature ; de l'extrémité à laquelle Il se voyait réduit. En d'autres circonstances Il priait debout ; mais en ce moment, dans l'angoisse de son âme, Il prie à genoux et prosterné contre terre.

3) Elle fut animée d'une grande confiance et d'un amour tout filial, comme le montre cette parole : Mon Père. En d'autres occasions, Il se contentait de donner à Dieu le nom de Père ; mais dans celle-ci, il dit : Mon Père, pour témoigner d'une manière plus particulière sa confiance et son amour envers celui qui est véritablement son Père, non par adoption, mais par nature.

4) Elle fut surtout remarquable par l'exemple admirable que nous donna le Sauveur d'un entier renoncement à la volonté propre et d'une parfaite résignation à la volonté divine. Les peines qu'il appréhendait étaient effrayantes ; son inclination naturelle le portait fortement à les éviter ; son affliction intérieure était indicible : d'où il suit que l'acceptation du vouloir divin contre l'inclination personnelle fut, dans cet ensemble de circonstances les plus difficiles, un acte de vertu héroïque. ­Toutes ces considérations doivent nous couvrir de confusion, en nous faisant voir que nous sommes entièrement dénués de ces vertus de notre divin modèle. Supplions-Le donc humblement de nous les communiquer ; et quand nous serons nous-même dans l'affliction, quelle qu'en soit la cause, ayons recours à la prière qu'Il nous en­seigne, et efforçons-nous de dire dans le même esprit que Lui : « Mon Père, s'il est possible, que ce calice s'éloigne de moi : cependant, qu'il en soit, non comme je veux, mais comme vous voulez. »

5) Un autre point digne de notre attention, c'est que la prière de Notre-Seigneur Jésus-Christ fut longue. Ne pensons pas qu'elle ne dura que le temps nécessaire pour prononcer les courtes paroles qu'elle renferme. Elle dura pour le moins une heure, comme on peut l'inférer du reproche que Jésus fit à saint Pierre : « C'est ainsi que vous n'avez pu veiller une heure avec moi. » Or, Il employa tout ce temps à peser les motifs qui pouvaient L'exciter au respect, à la confiance, à l'amour, à la résignation, et faire naître en Lui d'autres sentiments semblables, auxquels Il se livra durant sa prière. Il repassait aussi dans son esprit toutes les souffrances particulières dont se composait son calice ; Il les acceptait toutes, en disant, par exemple : Mon Père, s'il est possible, éloignez de moi le calice de la tristesse, faites néanmoins ce que vous voudrez, et non pas ce que je veux : éloignez de moi le calice de la flagellation... le calice du couronne­ment d'épines... cependant, que votre volonté se fasse, et non la mienne.

6) Pendant l'heure entière que dura cette prière, il est à croire que Notre-Seigneur y attacha plusieurs autres sens, comme les saints nous l'assurent. Ainsi, il fut révélé à sainte Catherine de Sienne que, pressé de voir enfin consommée l'œuvre de la Rédemption du monde, le Sauveur pria son Père que la durée de sa Passion fût abrégée, et que le calice qu'Il devait boire passât au plus tôt : ce qui lui fut accordé, puisqu'Il souffrit en peu d'heures tout ce qu'Il avait à souffrir.

À l'imitation de notre Sauveur, employons une heure, ou plus, à l'oraison dans un profond recueillement. Si le sujet que nous avons choisi est une courte sentence, tâchons de l'étendre par la variété des considérations et des affections. On raconte de saint François d'Assise qu'il passa une nuit entière en oraison sans dire autre chose que ces deux mots : « Mon Dieu, et mon tout ! » On sait aussi que saint Augustin répétait souvent : « Que je me connaisse, Seigneur, et que je vous connaisse ! »

III. — Jésus trouve ses apôtres endormis

Après avoir achevé sa prière Notre-Seigneur retourna vers ses disciples pour voir s'ils veillaient, comme Il le leur avait commandé ; mais Il les trouva endormis. Il les réveilla donc, et d'une voix pleine de douceur, Il leur dit à tous, et spécialement à Pierre, qui se piquait d'être le plus fervent : « C'est ainsi que vous n'avez pu veiller une heure avec moi ! Veillez et priez, afin que vous n'entriez pas en tentation ; car l'esprit est prompt, mais la chair est faibles. »

1) Admirons la charité de Jésus-Christ et la sollicitude qu'Il témoigne pour ses disciples. En proie Lui-même aux plus cruelles angoisses, Il interrompt sa prière pour les visiter et les encourager. Bien qu'Il les trouve plongés dans le sommeil, Il ne s'irrite point contre eux ; mais Il les reprend avec bonté ; Il les avertit du danger où ils sont ; Il leur répète, ce qu'Il leur avait déjà recommandé, de prier, afin de ne point succomber à la tentation, car, si l'esprit est prompt, la chair est faible ; et sans le secours de la prière elle sera vaincue.
Tirons de tout ceci des avis et des conseils de perfection, particulièrement les deux suivants : l'un, de nous adonner à l'exercice de l'oraison et du recueillement, sans toutefois négliger le soin des personnes et des affaires dont nous sommes chargés ; l'autre, de ne point reprendre avec sévérité, mais en esprit de mansuétude, alléguant des motifs qui marquent de l'affection, surtout à l'égard de ceux qui manquent par faiblesse plus que par malice.

2) Dans la conduite des disciples, reconnaissons la négligence que les hommes apportent aux choses de leur salut, tandis que Notre-Seigneur s'en occupe avec tant de zèle et en prend un soin tout particulier. Dans le sommeil des disciples, voyons l'image de notre assoupissement et de notre torpeur en ce qui touche à notre avancement spirituel. Imaginons que Jésus-Christ nous dit aussi bien qu'à ses apôtres : « Tu ne peux veiller une heure avec moi ! »

Ô mon Sauveur, que je mérite justement ce reproche I Vous veillez, et je me laisse vaincre par le sommeil. Je ne puis veiller non seulement une heure, mais pas même une demi-heure avec l'attention convenable : tant le courage me fait faute. Mais vous, Seigneur, qui voyez combien ma chair est faible, soutenez-moi par votre grâce, afin que je ne me lasse point de veiller en votre compagnie.

3) Remarquons les différents effets que produit la tristesse dans les parfaits et dans les imparfaits. Dans les imparfaits, elle engendre la somnolence, le découragement, le dégoût de l'oraison ; et parce qu'ils cessent de prier, ils finissent par succomber à la tentation, comme y succombèrent les apôtres en abandonnant leur Maître. Dans les parfaits, au contraire, la tristesse est comme un aiguillon qui les excite, qui les anime à prier. Plus elle augmente, plus ils prient avec ferveur, à l'exemple de Notre-Seigneur Jésus-Christ. Ainsi, loin de succomber à la tentation, ils demeurent fermes et inébranlables.

Ô Dieu plein de bonté, ne retirez de moi ni la prière, ni votre miséricorde. Aidez-moi à persévérer dans l'oraison ; car votre miséricorde ne m'aban­donnera pas, tant que je n'abandonnerai pas la prière.

IV. — Jésus prie pour la seconde fois

Jésus-Christ retourna au lieu de sa prière et commença à prier de nouveau, répétant les mêmes paroles, mais avec plus d'instance que la première fois. Il est probable qu'Il se servit alors des termes rapportés par saint Marc : « Mon Père, mon Père, tout vous est possible ; détournez de moi ce calice ; mais que votre volonté se fasse, et non la mienne. »

1) Considérons le redoublement d'amour et de confiance exprimé par ces paroles du Sauveur. D'abord, Il répète deux fois le nom de Père, puis, avant de demander ce qu'Il désire, Il reconnaît et exalte cette puissance sans limites, sur laquelle repose la prière. Comme s'Il disait : Vous ne pouvez vous empêcher de m'exaucer, ni faute d'amour, puisque vous êtes Père, et mon Père ; ni faute de pouvoir, puisque toutes choses vous sont possibles.
Servons-nous avec avantage de cette prière dans les périls et les afflictions, la modifiant selon les circonstances, de cette manière, par exemple :

Mon Père, mon Père, tout vous est possible ; délivrez-moi de la tentation que je souffre ; accordez-moi la vertu que je vous demande ; secourez-moi dans la nécessité où je suis : mais que votre volonté se fasse, et non la mienne.

2) Considérons que Notre-Seigneur Jésus-Christ employa un temps considérable à cette prière. Nous pouvons croire que, durant ce temps, Il pria pour tous les hommes ; car, comme Rédempteur universel, Il désirait, autant qu'Il dépendait de lui, que tous les hommes soient sauvés, que sa Passion soit utile à tous, et que le fruit de si grandes souffrances ne soit perdu pour personne. On peut penser que c'est aussi dans ce sens, joint au précédent, qu'Il prononça ces paroles : Mon Père, tout vous est possible : faites, s'il se peut, que le calice de ma Passion ne soit point pour moi seul, qu'il ne s'arrête pas à moi, mais que de moi il passe à tous les hommes, afin que tous en recueillent le fruit : néanmoins que votre volonté soit faite, et non la mienne. Cette demande est bien conforme à la charité de Jésus-Christ. Nous pouvons, nous aussi, l'adresser au Père éternel, Le suppliant que le calice de la Passion de son Fils passe efficacement à tout le monde, soumettant toutefois notre jugement et notre volonté à ses éternels décrets.
Dans cette pensée, représentons-nous Notre-Seigneur priant son Père de faire passer jusqu'à nous ce calice de souffrances et de nous en communiquer les fruits ; unissons notre prière à la sienne pour obtenir la même faveur, et disons :

Ô Père éternel, puisque votre Fils a voulu boire ce calice amer qui a la vertu de donner la vie, je ne dis pas au monde entier, mais à des milliers de mondes, montrez votre bonté et votre puissance en le présentant à une multitude innombrable d'hommes qui en profitent, à la gloire de celui qui l'a bu pour leur salut. Faites aussi qu'il vienne jusqu'à moi, et qu'il me rem­plisse à la fois de son amertume et des biens que mon Sauveur m'a mérités en le buvant le premier.

3) Considérons encore à ce sujet ce que Jésus dit dans cette seconde prière, au rapport de saint Matthieu : « Mon Père, si ce calice ne peut passer sans que je le boive, que votre volonté soit faite. » Comme s'Il avait dit : Si ce calice de la Passion ne peut passer aux élus et leur être utile à moins que je ne le boive, je veux le boire pour leur avantage.

Ô mon aimable Rédempteur, je Vous rends grâces de ce que Vous estimez tellement mon âme, que Vous vous offrez à vider un calice si amer pour procurer son salut. Il est bien nécessaire que Vous le buviez avant moi, afin qu'il perde en Vous son amertume, et que je puisse le prendre sans répugnance quand il Vous plaira de me le présenter. Si Vous ne l'aviez bu le premier, qui de nous aurait le courage de l'accepter ? Mais après Vous, qui ne le boira volontiers ? Qu'il passe donc, Seigneur, qu'il passe de Vous à moi ; car les souffrances qui auront passé par Vous seront douces pour moi.

V. — Jésus prie pour la troisième fois

Après avoir achevé la seconde prière, le Sauveur vint de nouveau vers ses disciples avec la même bonté que la première fois. « Les trouvant encore endormis », il eut compassion de leur faiblesse, « les laissa, et alla prier pour la troisième fois, disant les mêmes paroles : Mon Père, si vous voulez, éloignez de moi ce calice ; cependant, que ce ne soit pas ma volonté qui se fasse, mais la vôtre. » Cette dernière prière fut également fort longue ; car, ainsi que le remarque saint Luc : « Étant tombé en agonie, Il redoublait et prolongeait son oraison. »

1) Ici, considérons d'abord comment Notre-Seigneur Jésus-Christ, qui ne pouvait ignorer que ses disciples étaient endormis, ne laissa pas de les visiter, afin de montrer quel soin Il avait d'eux. Mais ce qui doit surtout attirer notre atten­tion, c'est l'étrange isolement auquel Il se sent réduit. Il est privé de toute consolation. Le lieu où Il prie est écarté ; le temps est obscur ; ses disciples dorment profondément, sa mère est absente ; son Père céleste paraît ne point l'écouter ; sa divinité et la partie supérieure de son âme laissent la partie inférieure dans la dernière désolation, de sorte qu'Il peut dire à juste titre avec le Roi-Prophète : « J'ai cherché un ami pour me consoler, et je ne l'ai point trouvé. » Il est à croire que dans cette extrémité Il adressa à son Père ces paroles du psaume vingt et unième : « Mon Dieu, mon Dieu, jetez sur moi vos regards ; pourquoi m'avez-vous abandonné ? Je crie vers vous le jour et la nuit, et vous ne m'écoutez point. »  Mais je sais que ce n'est pas par ma faute et que cela ne tournera pas à mon désavantage.

De là procède la persévérance du Sauveur. Il ne se plaint pas avec impatience de n'être pas écouté ; Il ne se décourage pas ; Il ne renonce pas à la prière ; Il renouvelle la même demande jusqu'à trois fois avec une ferveur toujours croissante, pour nous apprendre par ce nombre de trois, qui désigne la perfection et la durée, que nous devons prier avec instance et per­sévérance, sans nous plaindre de ce que Dieu ne nous exauce pas, ou de ce qu'Il tarde à nous exaucer, et sans cesser pour cela de prier. Car si le Fils de Dieu, qui méritait d'être écouté à la première parole, ne reçut de son Père aucune réponse avant de L'avoir prié trois fois ; pouvons-nous être étonnés que l'on nous fasse attendre, nous qui sommes indigne en toute manière d'être écoutés ? Au reste, nous devons tenir pour certain que comme le retard ne nuisit pas à Jésus-Christ, il ne nous nuira pas à nous-même ; et que, si nous continuons de prier, nous obtiendrons au temps convenable ce qui nous sera le plus utile, sinon en qualité d'ami, du moins à cause de notre importunité.

2) Considérons enfin que le Père éternel laissa son Fils prier un temps si considérable sans Lui répondre un seul mot, afin de nous faire comprendre combien ses souffrances et sa mort nous étaient nécessaires ; car c'est ce motif qui L'empêcha d'acquiescer à la demande que Lui faisait ce Fils bien-aimé, d'éloigner de Lui, s'il était possible, le calice de sa Passion. Après cela, pouvons-nous ne pas aimer un Père si charitable qui embrasse avec tant de zèle nos intérêts ?

Ô Père saint, comment se fait-il que Vous consentiez à affliger votre Fils unique par amour pour vos esclaves ? Comment Vous montrez-Vous sourd à sa demande et refusez-Vous d'accomplir ses désirs, par égard pour des ingrats qui n'accomplissent pas les vôtres ? Vous qui faites la volonté de ceux qui Vous craignent, et Vous empressez d'exaucer leurs prières ; comment ne faites-Vous pas la volonté de celui qui Vous aime tant ? Comment, dès qu'Il Vous invoque, ne Lui répondez-Vous pas : Me voici, que Me demandez-Vous ? C'est votre charité pour nous, ô mon Dieu, qui en est la cause ; mais c'est aussi la charité de votre Fils ; car Il ne veut pas obtenir ce que Vous ne jugez pas convenable de Lui accorder, et sa vie Lui est moins chère que notre salut. Donnez-moi, Seigneur, une semblable conformité à votre volonté en tout ce que Vous ordonnerez de moi ; car si je mérite d'être puni, je sais que Vous voulez, non pas me perdre, mais me sauver, pour l'amour de votre Fils, à qui soit honneur et gloire dans tous les siècles. Ainsi soit-il.

 

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