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Méditation pour le 4e mystère glorieux

Tirée de La vie de Notre Seigneur Jésus-Christ
de Ludolphe le Chartreux

L'Assomption

Aucun livre canonique ne nous raconte de quelle manière la bienheureuse Vierge fut enlevée au ciel ; et parmi les Latins, aucun ancien auteur ne donne d'histoire certaine sur ce sujet intéressant. Saint Jean lui-même, qui aurait pu nous en instruire mieux que tout autre, ne nous a laissé aucune relation écrite sur la précieuse mort de Celle qui lui avait été recommandée comme sa propre mère ; c'est sans doute parce que la divine Providence ne jugeait pas cette manifestation opportune. Saint Jérôme ajoute à ce propos :

« Dans la vallée de Josaphat, qui est située entre la montagne de Sion et celle des Oliviers, s'élève une admirable église consacrée à Marie ; on y montre encore un tombeau vide, où, suivant la tradition commune, cette bienheureuse Vierge avait été ensevelie. Je dis cela, parce que plusieurs Chrétiens de nos jours doutent si elle a été transportée dans le ciel avec son corps ou si ce corps est resté en terre ; car on ne sait ni quand ni comment il a disparu de ce lieu, s'il a été déposé ailleurs ou s'il a été réuni à son âme triomphante. Beaucoup d'autres soutiennent néanmoins que la Sainte-Vierge est déjà ressuscitée, et qu'elle est désormais revêtue d'une glorieuse immortalité dans la possession éternelle de son Fils bien-aimé. De ces deux sentiments, quel est le plus certain ? Nous n'osons le décider ; nous préférons cependant croire celui qui est le plus honorable à la toute-puissance divine, sans toutefois que nous prétendions définir par notre seule autorité ce qui nous paraît être plus probable. »

Ainsi parle saint Jérôme. Sur ce même sujet écoutons saint Augustin exprimer son sentiment en ces termes :

« Je fais remarquer d'abord que l'Évangile ne parle plus de la sainte Vierge depuis le moment où le Sauveur expirant sur la croix la confia à saint Jean ; et saint Luc se contente de dire dans les Actes des Apôtres (I, 14) : Tous ensemble persévéraient dans la prière avec Marie, mère de Jésus. Puisque l'Écriture ne fait mention ni de son trépas ni de son Assomption, nous devons chercher dans la raison ce qui, à cet égard, nous semblera plus conforme à la vérité ; car l'autorité n'a point de valeur sans la vérité. Quand donc je considère la condition humaine, je ne crains pas d'affirmer que la bienheureuse Vierge a subi la mort temporelle ; mais la parfaite sainteté qui convient à sa dignité sublime permet-elle de supposer que cette noble Mère du Très-Haut est tombée en pourriture, a été livrée aux vers et réduite en poudre comme la masse commune ? Il est vrai que le Seigneur a dit à notre premier père : "Tu viens de la poussière, et tu retourneras dans la poussière" (Gen. III, 19). Cependant la chair que Jésus-Christ avait prise de la sainte Vierge a échappé à cette sentence générale, de manière à ne point éprouver la dissolution ordinaire.

Il est également vrai que le Seigneur a dit à la première femme : "Je t'accablerai d'afflictions, et tu enfanteras dans la douleur" (Ibid. 16). La sainte Vierge a bien souffert d'immenses afflictions, lorsque son âme fut transpercée dans la Passion du Sauveur comme par un glaive acéré ; néanmoins, elle n'a point enfanté dans la douleur. C'est ainsi qu'elle a été dispensée de plusieurs lois universelles à cause de son incomparable dignité. Serait-ce donc une impiété de penser que, si la mort l'a frappée, elle ne l'a point pourtant retenue captive ? Si Jésus-Christ a voulu maintenir Marie toujours vierge sans tache ni souillure, pourquoi n'aurait-il pas voulu la préserver de toute infection et putréfaction ? Puisqu'il est venu dans le monde pour accomplir et non pour abolir la loi, ne devait-il pas comme un bon fils pourvoir à l'honneur de sa tendre Mère ? Et, puisqu'en naissant de son chaste sein, il l'a exaltée pardessus toutes les créatures durant sa vie, ne peut-on pas pieusement croire qu'il l'a favorisée d'un juste privilège, en la gardant d'une corruption humiliante ?

C'est un opprobre pour notre humanité d'être sujette à devenir un amas de pourriture et la proie des vers. Or comme notre Rédempteur en fut exempt, la Vierge dont il est né en fut pareillement affranchie ; car la chair de Jésus est la chair de Marie, de telle sorte qu'en élevant sa propre nature par-dessus les astres, le Sauveur a honoré celle de tout homme et principalement celle de son auguste Mère. Autant donc que je le conçois et que je le crois, Marie a reçu de son divin Fils une prérogative incomparable ; car non-seulement elle voit glorifié en Jésus-Christ le corps qu'elle a enfanté, mais de plus elle voit même glorifié en sa propre personne le corps où elle l'a conçu, telle est mon intime conviction jusqu'à ce qu'elle soit renversée par une autorité constante ; car un sanctuaire aussi vénérable, un trésor aussi précieux que le corps de Marie est plus convenablement placé et conservé au ciel que sur la terre ; et parce qu'il resta pur sans être jamais souillé, il mérita bien de demeurer incorruptible sans être jamais dissous. Voilà pourquoi je n'ose ni dire ni penser qu'un dépôt aussi sacré soit devenu la pâture des vers ; une pareille supposition semble inconciliable avec l'excellence de la divine maternité. D'après plusieurs raisons tirées des Écritures, je dois confesser que le Seigneur, après avoir rempli la sainte Vierge d'une grâce supérieure, l'a comblée d'une gloire suréminente, en l'associant aux joies de l'éternité plus parfaitement que tous les autres ; que par conséquent, après avoir donné le jour à son Sauveur et au Sauveur du monde, elle n'a point été abandonnée dans le tombeau à l'humiliation commune de la pourriture.

En effet, si, par sa volonté miséricordieuse, le Seigneur a garanti des flammes dévorantes non seulement les personnes, mais même les vêtements des trois jeunes Hébreux dans la fournaise de Babylone, s'il a délivré de tout mal le prophète Jonas dans le ventre de la baleine, s'il a protégé Daniel contre les dents meurtrières des lions affamés, est-ce que par une juste bienveillance, il n'aurait pas soustrait à la corruption, aux vers et à la poussière sa propre Mère ornée de tant de vertus, de mérites et de prérogatives ?

Puisque, pour arracher à différents périls ses simples serviteurs, il ne s'est point astreint à suivre l'ordre de la nature, nous ne doutons point que, pour conserver Marie dans toute son intégrité, il n'ait préféré suivre l'ordre de la grâce. Donc, Marie règne en corps et en âme avec son divin Fils ; elle, qui l'a jadis enfanté sans éprouver d'atteinte à sa virginité, le possède maintenant sans subir d'altération en sa chair ; et Celle qui a produit l'Auteur de la vie pour tous jouit de la vie complète en tout son être. Si dans ce discours j'ai parlé comme je devais, veuillez l'agréer, Seigneur, vous et les vôtres ; sinon daignez me le pardonner. »

Telles sont les paroles de saint Augustin. Nous devons croire par conséquent que, si la sainte Vierge a été soumise à la mort, du moins elle ne l'a point été à la corruption. Après son paisible trépas, son âme bienheureuse ne tarda point à se réunir à son corps glorifié ; elle fut alors portée en triomphe dans le ciel, comme l'a décrit saint Jérôme dans son sermon pour la solennité de l'Assomption :

« C'est en ce jour illustre, dit-il, que la Vierge immaculée fut ravie dans les hauteurs des cieux, où elle est assise sur un trône de gloire, à côté de son divin Fils. Aussi la sainte Église ne craint pas de proclamer qu'elle a été exaltée par-dessus tous les chœurs angéliques ; cet éloge lui convient d'une manière tellement exclusive qu'on n'en peut dire autant d'aucun autre saint ; car bien que les saints soient semblables aux anges, comme Jésus-Christ le déclare, ils ne leur sont cependant point supérieurs. Représentons-nous donc toute la cour céleste qui s'empresse d'aller à la rencontre de cette reine environnée d'une lumière étincelante ; au milieu des hymnes et des cantiques, elle est conduite jusqu'à la place sublime qui lui fut préparée avant la création du monde. Nul doute que toute la Jérusalem céleste n'ait alors tressailli d'une allégresse ineffable, retenti d'immenses acclamations et ressenti un accroissement de dilection et de félicité. Ce n'est pas sans raison : car le Seigneur des armées, escorté de ses phalanges victorieuses, s'avança lui-même au-devant de sa digne Mère pour lui faire honneur ; et après l'avoir introduite dans son royaume, en lui témoignant une tendre affection, il la fit siéger majestueusement à sa droite. Or, si les habitants des cieux se réjouissent en apprenant la conversion d'un pécheur sur la terre, quels ne durent pas être leurs transports en voyant l'exaltation de leur Souveraine dans l'empyrée. Son triomphe et sa glorification excitèrent leur jubilation et leurs applaudissements, parce que les honneurs rendus à Marie se rapportent à Jésus, le Sauveur de tous.

Cette intronisation solennelle dont nous célébrons la mémoire chaque année, ils en célèbrent la fête durant toute l'éternité avec des sentiments continuels d'allégresse et d'admiration, d'amour et de vénération ; car ils ne se lassent point de bénir et de féliciter la Vierge immaculée dont ils ne cessent point de servir et d'adorer le Fils comme leur Roi, devant lequel toutes les puissances s'abaissent et tous les genoux s'inclinent respectueusement. Aussi, n'y a-t-il point de perfection et de beauté, de splendeur et de gloire qui ne brillent avec un éclat incomparable en cette divine Mère. Toutefois, si vous aimez à contempler les prérogatives dont elle est décorée, n'oubliez pas de considérer les vertus qu'elle a pratiquées ; car sa vie est un modèle pour tous les Chrétiens, et sa conduite a servi de règle pour l'Église entière. Assurément, il n'est point au monde de créature plus excellente et plus puissante ; afin de mériter sa protection et d'obtenir son assistance, efforçons-nous de marcher sur ses traces et d'imiter ses exemples. »

Après avoir entendu saint Jérôme, écoutons saint Bernard (Serm. I de Assumpt.)

« Aujourd'hui notre terre envoie au ciel un présent très précieux pour établir entre Dieu et l'homme un commerce d'amitié par un heureux échange de dons réciproques. Voilà qu'en effet un fruit merveilleux de la terre s'élève jusqu'au ciel, d'où descendent les grâces excellentes. La Vierge Marie monte au-dessus des astres afin de répandre ses bienfaits sur les hommes. Et que ne donnera-t-elle pas ? Elle en a la faculté et la volonté, parce qu'elle est toute-puissante et très miséricordieuse, comme Reine de l'univers et Mère du Fils de Dieu. Ces titres sont les plus propres à relever la grandeur de son pouvoir et de sa bonté ; car pourrait-on supposer que le Fils de Dieu n'honore point sa Mère ? ou pourrait-on douter de l'affectueuse charité de Celle qui durant neuf mois a porté dans ses chastes entrailles la Charité incarnée ? Sans parler davantage des bienfaits que nous procure son exaltation, si nous aimons Marie, nous nous réjouirons certainement, parce qu'elle va retrouver son Fils ; et nous l'en féliciterons, à moins que nous ne soyons monstrueusement ingrats envers notre généreuse bienfaitrice. Aujourd'hui, dès son entrée dans la sainte Sion, elle est reçue par Celui qu'elle-même avait déjà reçu, quand il était entré dans ce monde inférieur. Avec quel honneur, quelle joie et quelle gloire il s'empresse de l'accueillir ? Sur la terre, il n'y eut jamais de temple plus auguste que le sein virginal où Marie admit le Fils de Dieu ; au ciel pareillement, il n'y a point de degré plus sublime que le trône royal où le Fils de Dieu place aujourd'hui Marie. Des deux côtés, on ne peut voir de plus dignes réceptions ; elles sont l'une et l'autre ineffables, parce qu'elles sont incompréhensibles. Pourquoi donc, en cette fête de l'Assomption, l'Église fait-elle lire l'Évangile qui raconte comment une femme privilégiée eut le bonheur de loger le Sauveur ?

À mon avis, c'est pour que cette réception nous fasse estimer de quelque manière celle dont nous célébrons aujourd'hui la mémoire ; ou plutôt c'est pour que la gloire inestimable de la première nous donne quelque idée de la seconde pareillement inestimable. En effet, lors même que quelqu'un parlerait le langage des hommes et des Anges, pourrait-il jamais expliquer comment par l'opération mystérieuse du Saint-Esprit s'est fait chair le Verbe de Dieu, par qui tout a été fait ; et comment le Seigneur d'une majesté infinie, qui n'est point circonscrit dans les limites de l'univers, s'est néanmoins renfermé dans les entrailles d'une Vierge, en s'incarnant ? Qui pourrait aussi concevoir avec quelle splendeur la Reine du monde s'élève de la terre en ce jour ; avec quelle dévotion les légions célestes s'avancent en foule à sa rencontre ; avec quels cantiques harmonieux elle est introduite dans les tabernacles éternels ; avec quel gracieux visage, avec quel aimable sourire et quels joyeux embrassements JésusChrist l'aborde et la salue, l'exalte au-dessus de toute créature et la comble de toutes les faveurs, comme il convient à une telle Mère et à un tel Fils ? Assurément, elle fut heureuse autrefois de recueillir les baisers du divin Enfant, lorsqu'elle le pressait avec une pieuse tendresse sur son sein virginal, en le nourrissant d'un lait très-pur ; mais n'est-elle pas plus heureuse encore de recueillir les baisers de l'Homme-Dieu assis à la droite du Père éternel, aujourd'hui qu'elle monte triomphante vers le trône de gloire, en chantant les suaves paroles de l'épithalame sacré : "Qu'il me donne un baiser de sa bouche" (Cant. I, 1) ? Oh ! qui racontera la génération du Christ et l'Assomption de Marie ? Car autant cette divine Mère surpassait en grâce toutes les créatures, tandis qu'elle demeurait sur terre ; autant elle les surpasse en gloire, maintenant qu'elle réside au ciel. Si comme l'assure saint Paul (I Cor. II, 9) l'œil n'a point vu, l'oreille n'a point entendu, le cœur de l'homme n'a point ressenti ce que Dieu a préparé à ceux qui l'aiment, qui peut dire, savoir ou comprendre ce qu'il a réservé pour sa propre Mère qui l'aime plus que tous les autres ? Heureuse donc Marie et mille fois heureuse, d'abord quand elle reçoit le Sauveur, puis quand le Sauveur la reçoit elle-même à son tour ! »

Avant que saint Bernard s'exprimât de la sorte, saint Anselme avait dit sur le même sujet (De Excellent. B. V. M. c. 8) :

« Quand Notre Seigneur eut résolu d'appeler sa propre Mère dans son royaume éternel pour lui manifester la magnificence de sa gloire, quel appareil d'honneur et de dignité ne déploya point toute la cour des Anges ? quels cantiques de louange et d'allégresse ne firent point retentir les anciens justes, associés depuis quelque temps aux purs esprits ? Tous les citoyens de l'heureuse patrie se disposèrent à recevoir leur Souveraine avec une pompe extraordinaire, en se livrant à une jubilation ineffable. Faut-il s'en étonner ? Jésus lui-même, leur divin Maître, Fils de cette très-chaste Vierge, voulut aller avec empressement à la rencontre de sa Mère bienaimée ; est-ce qu'alors quelqu'un de ses familiers aurait négligé de participer à la joie de cette grande fête ? N'est-il pas d'usage parmi les hommes que tous les fidèles serviteurs témoignent une vive satisfaction en voyant venir un ami particulièrement cher à leur puissant seigneur ? et que ne font-ils pas surtout pour accueillir convenablement ses plus proches parents ? S'il en est ainsi dans ce monde même, où ceux qui sont bons le sont beaucoup moins que dans la sainte Jérusalem, quels ne durent pas être les délicieux transports et les mélodieux concerts des célestes habitants, quand ils apprirent que la Mère de Dieu allait arriver en leur compagnie et que le Fils de Dieu allait l'admettre en son règne. Lui-même, en effet, accompagné de plusieurs myriades ou plutôt d'innombrables chœurs d'anges, s'élance au-devant de cette Vierge auguste qui s'élève de la terre ; il la fait monter au plus haut des cieux, et la fait asseoir sur un trône d'honneur, d'où elle doit dominer éternellement avec lui sur toutes les créatures. Depuis ce moment, fut-il jamais réception plus solennelle, exaltation plus sublime ?

Ce jour de triomphe et de bonheur suprême pour vous, notre douce Reine, est un sujet de réjouissance et d'admiration continuelle pour tous les siècles ; car aujourd'hui, non-seulement vous êtes comblée d'une gloire incomparable, mais encore le ciel même avec tout ce qu'il contient est orné d'une gloire nouvelle par votre présence, qui en accroît la splendeur au-delà de toute pensée et de toute expression. Lorsque vous avez pénétré dans ce bienheureux séjour, ô illustre Souveraine, vous l'avez ennobli par l'excellence de vos vertus et de vos mérites, en même temps que vous l'avez enrichi par la surabondance de vos grâces et de vos miséricordes. Alors, les purs esprits qui, depuis le commencement du monde, jouissaient de l'éternelle béatitude, tressaillirent d'une allégresse extraordinaire ; car en voyant que le fruit béni de votre féconde virginité avait réparé les nombreuses pertes de leur sainte cité, ils durent ressentir une joie plus grande à l'arrivée de Celle qui leur avait procuré des biens si considérables. »

« Femme bénie entre toutes les autres, continue le même saint docteur, au jour de votre Assomption, la terre aussi fut arrosée d'une grâce merveilleuse ; car en apprenant que vous-même, formée d'elle et sortie d'elle comme tous les enfants de la race humaine, vous étiez exaltée jusqu'au trône du Créateur, elle crut fermement que, à la faveur des bénédictions dont vous étiez remplie, elle était soustraite désormais à la peine de l'antique malédiction, justement encourue par la faute de nos premiers parents. Que puis-je ajouter ? car celui qui désire célébrer la grâce et la gloire dont vous avez été comblée sent défaillir son intelligence et sa langue devant ce sujet immense. Votre triomphe, en effet, a non seulement embelli d'une façon inappréciable tout ce qui est au ciel ; mais de plus il a relevé d'une manière ineffable tout ce qui est sur la terre. Tous les hommes ont acquis un très haut degré d'honneur quand, à cause de votre heureuse Virginité sans tache, ils sont devenus capables de connaître, d'aimer et de servir leur Dieu surnaturellement. En voyant que vous, leur sœur, après avoir vécu parmi eux ici-bas, vous étiez transportée par-dessus tous les cieux et placée près de votre divin Fils, ils ont reconnu qu'ils ne devaient rien aux vaines idoles, mais qu'ils devaient tout à leur Dieu, incarné dans votre sein très chaste pour rétablir son œuvre détériorée. Quelles louanges et quelles félicitations l'univers entier doit aussi conséquemment. à cette Vierge très sainte qui, par son incomparable pureté devenant mère de Dieu, a mérité de devenir la réparatrice du monde perdu. Aucun simple mortel ne peut suffisamment estimer combien de reconnaissance elle mérite pour avoir procuré un si grand bien à toute la création ; car tout ce que Dieu avait fait bon originairement était dégradé, lorsqu'il fut ramené à son ancien état au moyen de cette Vierge immaculée. Ainsi donc, comme Dieu est le père et le maître de tous ceux qu'il a créés par sa puissance et constitués par sa sagesse, Marie pareillement est la mère et la maîtresse de tous ceux qu'elle a réhabilités par ses mérites et reconstitués par la grâce dont elle s'est rendue digne.

Et comme Dieu a engendré de sa propre substance Celui qui a donné la première existence à toutes choses, Marie aussi a produit de sa propre chair Celui qui leur a rendu l'intégrité primitive. En outre, comme rien ne se maintient à moins que le Fils de Dieu ne le soutienne, de même nul ne se sauve à moins que le Fils de Marie ne le rachète. Quiconque voudra considérer l'influence prodigieuse que cette femme privilégiée a exercée pour la restauration du monde, sera frappé de stupeur et réduit au silence dans l'impuissance de concevoir l'éminence de sa dignité. C'est pourquoi, sans sonder des secrets pour nous  impénétrables, ne nous lassons point de la prier, afin de ressentir heureusement l'effet des mystères que nous ne pouvons comprendre. D'après les raisons que nous venons d'exposer, nous devons conclure qu'aucun homme ne peut être réprouvé de Dieu s'il implore et s'il obtient la protection de Marie ; car elle-même a conçu et enfanté Celui qui délivre les hommes de la mort et du péché, Celui-là seul qui peut les sauver ou les damner, Celui-là seul par conséquent qu'ils doivent craindre et en qui ils doivent espérer. Or si Marie est la Mère de Dieu, elle est en même temps la Mère des hommes ; si son Fils est leur Juge et leur Sauveur, il est également leur Frère. Comment-donc pourrions-nous n'avoir pas confiance, puisque notre salut ou notre damnation dépendent d'un Frère aussi bon et d'une Mère aussi tendre ? Ce bon Frère nous laissera-t-il punir après avoir expié nos fautes ? et cette tendre Mère nous laissera-t-elle perdre après nous avoir donné un Rédempteur ? Assurément cette douce Mère suppliera son doux Fils et Celui-ci l'exaucera certainement en faveur des enfants qu'elle a adoptés et des frères qu'il a affranchis. »

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